Mardi de la dix-septième Semaine du Temps Ordinaire-Année B
Posté par diaconos le 27 juillet 2021
De même que l’on enlève l’ivraie pour la jeter au feu, ainsi en sera-t-il à la fin du monde
De l’évangile selon Matthieu
36 Alors, laissant les foules, il vint à la maison. Ses disciples s’approchèrent et lui dirent : « Explique-nous clairement la parabole de l’ivraie dans le champ. » 37 Il leur répondit : « Celui qui sème le bon grain, c’est le Fils de l’homme ; 38 le champ, c’est le monde ; le bon grain, ce sont les fils du Royaume ; l’ivraie, ce sont les fils du Mauvais. 39 L’ennemi qui l’a semée, c’est le diable ; la moisson, c’est la fin du monde ; les moissonneurs, ce sont les anges.
40 De même que l’on enlève l’ivraie pour la jeter au feu, ainsi en sera-t-il à la fin du monde. 41 Le Fils de l’homme enverra ses anges, et ils enlèveront de son Royaume toutes les causes de chute et ceux qui font le mal ; 42 ils les jetteront dans la fournaise : là, il y aura des pleurs et des grincements de dents. 43 Alors les justes resplendiront comme le soleil dans le royaume de leur Père. Celui qui a des oreilles, qu’il entende ! » (Mt 13, 36-43)
Parabole du semeur
Avec quelle assurance Jésus attribua à son action sur ce monde, tout le bien qui s’y trouve, tous les « fils du royaume » ! Dans la parabole du semeur, où il s’agit de répandre dans la terre une semence qui représente la « Parole de Dieu », Jésus-Christ, tout en restant le premier et le grand semeur, put considérer tous ses serviteurs fidèles comme des continuateurs de son œuvre. Mais ici, où cette semence représente des hommes engendrés par la parole de la vérité, productions vivantes de la première semence, créations de l’Esprit de Dieu, le Sauveur est le seul qui puisse en remplir ce champ qui est le monde ; en ce sens, semer la bonne semence est son œuvre exclusive.
Cette œuvre, il l’a accomplie de tout temps, comme Parole éternelle au sein de notre humanité ; il l’accomplissait alors sur la terre, où il était venu opérer une création nouvelle, et il l’accomplira jusqu’à la fin des temps. Le monde : cette parole est la clef de notre parabole. Jésus n’entendit pas par là la partie mauvaise de l’humanité, par opposition au peuple de Dieu ; mais bien cette humanité tout entière, que Jésus appela à bon droit son champ ou son royaume, et qui est fut destinée par la miséricorde divine à recevoir la bonne semence et à devenir le royaume des cieux.
De tout temps il y eut des interprètes qui, méconnaissant ce détail fondamental de la parabole : « Le champ c’est le monde », y substituèrent de diverses manières ce sens tout différent : le champ c’est l’Église. Alors, en présence de la question empressée des serviteurs : « Veux-tu que nous allions la cueillir » ? Et de la réponse catégorique de Jésus « Non » ! Ils se résignèrent à ne voir dans l’Église chrétienne que cette confusion perpétuelle de l’ivraie et du froment, des fils du royaume et des fils du démon, dont le monde offre le spectacle et dont la parabole serait l’image.
Ainsi Calvin, malgré ses principes rigoureux de discipline, assez peu conciliables avec la défense de Jésus s’il s’agit ici de l’Église, se consola de la confusion qui y resta, en écrivant ces mots : « Mais cette solution doit nous suffire que Christ ne parle pas ici dans sa défense de l’office des pasteurs ou des magistrats, mais ôta seulement le scandale qui troubla les infirmes, quand ils virent que l’Église ne consista pas seulement en des élus, mais qu’il y eut aussi des méchantes canailles. »
D’autre part, il y eut toujours, depuis les donatistes d’Afrique jusqu’aux hommes du Réveil, des chrétiens qui pensèrent pouvoir constituer des Églises triées, soumises à une sévère discipline, estimant que la défense de Jésus ne concernait que l’humanité rebelle et hostile à l’Évangile. Mais ce mot, dans la pensée de Jésus, avait une signification plus étendue et plus universelle, embrassant l’humanité tout entière, dans laquelle la puissance des ténèbres fut en lutte constante avec l’Évangile du salut.
Voici dès lors ce que Jésus prescrivit à ses serviteurs, dans des vues pleines de sagesse et de miséricorde. Il ne leur demanda pas de voir avec indifférence l’erreur, le mensonge, le péché, toutes les corruptions et les iniquités que l’ennemi du royaume de Dieu sema dans le monde ; il leur ordonna au contraire de les combattre avec toute la puissance et l’énergie que donnent les armes spirituelles de la Parole et de l’Esprit de Dieu.
Mais ce qu’il leur interdit d’une manière absolue, ce fut de recourir dans cette lutte aux armes charnelles, d’y faire intervenir le pouvoir séculier, d’employer la contrainte, d’user de moyens matériels de répression et de propagande. La raison de cette interdiction est indiquée par la parabole : « le froment et l’ivraie représentent des hommes « ; or, arracher celle-ci, la détruire avant le temps, ce serait exercer un jugement qui n’appartient qu’à Dieu.
Ce que Jésus prévoyait fut toujours arrivé : en s’imaginant cueillir l’ivraie, ces serviteurs, désobéissant à son ordre,arrachèrent le froment. Ce furent les esprits les plus nobles, les plus indépendants, les plus pieux qui devinrent leurs victimes. Qui ne voit quelle lugubre série de persécutions, d’iniquités et de crimes eût été épargnée à l’humanité, si tous avaient compris et observé cette seule parole de Jésus : « Laissez-les croître ensemble jusqu’à la moisson !
Ce mélange, tout affligeant qu’il fut, dut servir au salut des uns, à l’épreuve et à la patience des autres. Mais la confusion ne durera pas toujours : « il vient, le jour de la moisson, et alors ce que les serviteurs désirèrent sera accompli, non par des hommes faillibles et pécheurs, mais par la main des anges exécutant la justice de Dieu.
Dans la parabole du semeur, la semence est la parole de Dieu, tombant dans le cœur d’hommes diversement disposés. Ici, c’est cette même parole qui a produit des effets contraires selon qu’elle a été reçue ou repoussée ; et ces effets de la parole divine sont identifiés dans un langage plein de hardiesse avec les hommes eux-mêmes qui les éprouvent.
Les uns sont fils du royaume ; ils y ont été introduits et ont été engendrés par la parole, ils sont animés de l’esprit de ce royaume. Les autres sont fils de Satan, de celui qui sème l’ivraie ; ils sont sous son influence , animés de son esprit. Les serviteurs, qui, dans la parabole, représentent les disciples de Jésus, avaient demandé avec étonnement et douleur : » D’où vient qu’il y a de l’ivraie ? »
Le problème désolant de toute philosophie et de toute théologie : d’où vient le mal dans ce monde qui est le champ de Dieu, et où il n’a pu semer que le bien ? La réponse de Jésus fut la seule vraie théodicée. Elle écarta d’un mot tous les systèmes qui, d’une façon ou d’une autre, firent remonter le mal jusqu’à Dieu, et qui par là touchent au blasphème.
Le mal ne vient pas non plus de l’homme, il n’est pas essentiel à sa nature : donc il y a pour lui espoir de guérison. Il vient du dehors, d’un ennemi qui est le diable. Cet enseignement de Jésus est conforme à toute l’Écriture, conforme aussi à la saine raison : » Le péché, qui n’existe que dans une volonté vivante et personnelle, ne peut avoir son origine que dans une volonté personnelle qui en a été la source. » ( R. Stier).
Jésus fit entendre cette déclaration précise, non dans la parabole, mais pour expliquer la parabole et nous en indiqua le sens. Rien ne provoqua cette déclaration, donnée spontanément dans le cercle intime des disciples. Le diable fut nommé comme l’auteur personnel d’une action positive, comme source et origine du mal dans le monde, par opposition à un autre être personnel, le fils de l’homme, auteur et origine du bien.
La fournaise du feu est l’achèvement de l’image de l’ivraie qu’on brûle. Elle n’en représente pas moins une vive souffrance. Pourquoi Jésus appela son royaume ce champ du monde, qu’il purifie de toute souillure, le nomme-t-il maintenant le royaume du Père ? L’apôtre Paula répondit : « C’est qu’alors la fin sera venue, et le Médiateur, après avoir aboli tout empire, et toute puissance, et toute force aura remis le royaume à Dieu le Père, afin que Dieu soit tout en tous » » (1Co 15, 24-28).
Tel est le terme glorieux des destinées de notre humanité. Ces destinées sont tout entières expliquées dans cette parabole, depuis l’origine du mal et du bien, et du douloureux mélange de l’un et de l’autre, jusqu’à la journée où ce mystère sera résolu par le rétablissement du royaume de Dieu dans la perfection ! En présence de telles pensées, il y eut une grande solennité dans ce dernier appel de Jésus : » Que celui qui a des oreilles, entende ! »
Diacre Michel Houyoux
Compléments
◊ Diacre Michel Houyoux : cliquez ici pour lire l’article → L’homme qui jette en terre la semence, qu’il dorme ou qu’il se lève, la semence grandit, il ne sait comment
◊ ◊ Diacre Michel Houyoux : cliquez ici pour lire l’article → Le bon grain et l’ivraie
Liens avec d’autres sites web chrétiens
◊ Dom Amand Veilleux (Abbaye de Scourmont – Belgique) : cliquez ici pour lire l’article → Homélie pour le mardi de la 17ème semaine du Temps ordinaire
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