Saint Justin de Naplouse
Posté par diaconos le 1 juin 2024
Saint Justin de Naplouse
Justin de Naplouse vint au monde à Flavia Neapolis, actuelle Naplouse en Cisjordanie vers le début du IIe siècle fut un apologète et philosphe chrétien. Après s’être essayé à différentes doctrines philosophiques, Justin se convertit au christianisme qu’il considéra comme la forme la plus achevée de l’enseignement philosophique et s’engagea dans une carrière de philosophe et de prêcheur itinérant.
De naissance libre, il était citoyen romain, sa famille paternelle, dont l’ascendance évoque une origine païenne, semble issue de colon grecs romanisés arrivés sur place à la suite de l’écrasement de la révolte. Le fait qu’il déclara appartenir à la race des samaritains rendit plausible l’hypothèse selon laquelle une partie de ses racines furent également présentes de longue date en Samarie.
Il ouvrit une école à Rome où il composa une grande partie de son œuvre apologétique qui, rédigée en langue grecque, à l’exception de deux Apologies adressées à l’empereur Antonien le Pieux et ses fils ainsi que du Dialogue avec Tryphon, considérés comme témoins des premiers jalons dans la séparation entre le christianisme et le judaïsme.
Condamné au terme d’un procès instruit par le préfet et philosophe romain Junius Rusticus, il subit le martyre à une date inconnue de la seconde moitié du IIe siècle. Reconnu Père de l’Église, il est célébré depuis l’Antiquité comme saint et martyr par l’Église orthodoxe le 1er juin, rejointe par l’Église catholique depuis 1969.
Biographie
La documentation biographique concernant Justin est essentiellement constituée des éléments autobiographiques que l’on trouve dans ses écrits, dont les tournures fort stylisées ne peuvent garantir l’authenticité du propos Cette base est complétée par des Actes du martyre de Justin et de ses compagnons, dont trois recensions nous sont parvenues, ainsi que d’éléments rapportés par Eusèbe de Césarée dans son Histoire de l’Église et par Épiphane de Salamine.
D’après l’adresse aux empereurs qui introduit son Apologie, Justin était le fils d’un certain Priscus lui-même fils d’un certain Baccheios, tous deux originaires de Flavia Neapolis, une ville nouvelle de Samarie fondée dans la province de Judée par Vespasien au lendemain de la Grande révolte Juive (66-70) non loin des ruines de Sichem.
Justin, était complètement héllénisé, affirma être non circoncis, car il n’était ni samaritain ni juif de religion. Il ne témoigna d’aucune connaissance particulière de la religion samaritaine, son ignorance de l’hébreu fut en revanche questionnée
Il était au courant de certaines interprétations rabbiniques et de croyances qui leur étaient liées : sa bonne connaissance du judaïsme en général et de la Septante en particulier ainsi que la proximité tant de ses modes de raisonnement que de son exégèse avec les pratiques des rabbins attestèrent soit d’une grande familiarité avec cet univers, soit d’une initiation de bonne heure et approfondie avec des éléments Judéo-chrétiens.
Justin s’assimila à la culture hellénistique dont il étudia la philosophie et aux divinités de laquelle il crut. Après avoir reçu une formation à dominante littéraire, classique à l’époque, il partit à la recherche des réponses aux questions essentielles qu’il se posait : il s’engagea ainsi qu’il l’exposa dans les premiers chapitres du Dialogue avec Tryphon, dans une laborieuse recherche de la vérité auprès de différents maîtres philosophes dont il releva déçu les faiblesses, la suffisance du stoïcien, l’âpreté au gain du péripatéticien et les prétentions encyclopédiques du pythagoricien.
Il trouva enfin un certain contentement auprès d’un platonicien des plus éminents, auprès duquel il adhéra au platonisme moyen dont il estima que ce fut l’unique philosophie qui s’élevait au-dessus des choses matérielles et permit d’ immédiatement accéder à la vision de Dieu, car tel est le but de cette philosophie.
L’acquisition de cet enseignement philosophique de niveau supérieur lui fut précieux par la suite pour dialoguer efficacement avec l’élite intellectuelle de son temps. Peu après la révolte de Bar Kokhba (132-135), qu’au terme de ce parcours éclectique, habituel à l’époque, les nouvelles certitudes de Justin furent bouleversées par la rencontre d’un antique vieillard chrétien, non loin de la mer, dans une ville portuaire de Méditerranée, à Éphèse, Césarée, Naplouse ou Corinthe.
Justin se convertit au christianisme à la rencontre de ce didascale âgé qui lui fit connaître les Écritures et leur véritable sens, rapportant en outre son admiration du comportement exemplaire des chrétiens ainsi que du courage des martyrs devant la mort.
Après cette conversion, tout en continuant de porter le tribon, nom grec du pallium des philosophes, Justin s’engagea dans une carrière de didascale privé et de prêcheur itinérant, enseignant la doctrine chrétienne dans des milieux jusque là peu atteints par les prosélytes, notamment auprès des cercles cultivés.
Julien se présenta comme un philosophe et parlant du christianisme comme d’une forme plus achevée de l’enseignement philosophique, une doctrine conforme à la raison et à la vérité dans la plus pure tradition de la philosophie grecque.
Loin de la superstition, le christianisme fut pour Justin l’école de philosophie par excellence, celle qui intégra la philosophie des autres et fit partie d’une des formes les plus hautes de la pensée, constituant l’aboutissement divin de tout effort de réflexion humaine.
« Prêchant la parole de Dieu et combattant dans ses ouvrages pour la défense de la foi », Justin voyagea beaucoup et, d’après les Actes de Justin, fit deux longs séjours à Rome, entrecoupés d’un retour en Orient.
À Rome, Justin s’opposa au philosophe stoïcien Crescens le Cynique dans une controverse publique dont l’issue l’obligea à quitter la ville et il y composa, vers 155, une des Apologies qui nous est parvenue, adressée à l’empereur Antonin, à ses fils adoptifs Verissymus, le futur Marc Aurèle et Lucius Verus ainsi qu’au Sénat.
Lors de son deuxième séjour, peut-être à l’époque d’Antonien le Pieux, il s’installa dans la capitale et, à l’instar de maîtres valentiniens, carpoceatiens ou de personnalités comme Marcion et les addoptianistes Théodote le Corroyeur suivi de son disciple Théodote le Banquier, ouvrit sa propre école de philosophie au-dessus d’un établissement de thermes.
Il y reçut tout individu désireux de le rencontrer et y enseigna l’exégèse des Écritures en vertu d’un don d’interprétation, une grâce qu’il revendiqua. D’après son témoignage lors de son procès, Justin dit qu’il faisait partie de groupes domestiques de taille encore réduite, provenant tant de la campagne que de la ville et se réunissant en différents lieux de la capitale en des assemblées auxquels les membres étaient libres de s’affilier. Justin mentionna l’existence de prophètes, de diacres et d’une personne qui préside les célébrations eucharistiques et administre les ressources, l’organisation de ces communautés étaient embryonnaire et les fonctions peu établies.
On y releva la présence notable de personnes fortunées qui venaient en aide aux veuves, orphelins et plus généralement aux personnes dans le besoin.
Ce fut à Rome que Justin composa la plupart de ses œuvres, son Dialogue avec le juif Tryphon fut composé entre ses deux séjours romains, et il exerça une certaine influence au sein la communauté chrétienne locale au point que, bien qu’on ne puisse en définitive en mesurer la portée réelle.
On lui attribua un rôle important dans l’exclusion de Marcion dont il condamna virulemment le dithéisme et contre lequel il composa un traité. Justin dénia la qualité de chrétien à Simon le Sage et à son disciple Ménandre qui se trouvaient à Rome.
Procès et exécution
Bien qu’il fut bien intégré au sein de l’élite culturelle romaine, les prises de position de Justin l’amenèrent à comparaître devant les autorités de la Ville. Probablement assez proche des procès-verbaux originaux, ces comptes-rendus exposèrent pour la première fois, du point de vue d’un accusé chrétien, le problème du fondement légal en droit romain d’une persécution.
Si l’on suit les Actes de Justin, le maître chrétien aurait contrevenu à des ordonnances impies sur l’idolâtrie, une nouvelle législation édictée par Marc Aurèle, ordonnant aux sujets d’un Empire mis à mal par différentes menaces de sacrifier aux dieux dans le but de reconstituer une union sacrée et la pax deodorum. Les contrevenants refusant de rejoindre la communauté et son espace sacrificiel furent alors considérés comme séditieux.
Une autre version, reprise par Eusèbe, évoqua une affaire plus locale l’opposant à son collègue philosophe Crescens qui l’aurait dénoncé aux autorités ainsi que certains de ses disciples, soupçonnant la propagation prosélyte d’une doctrine déviante, matérialisée par ses Apologies en défense du christianisme.
En tout état de cause, Justin comparut devant le préfet de la ville qui était chargé tant de l’application de la loi que du maintien de l’ordre. À cette époque, le philosophe stoicien J938
Runius Rusticus, maître et ami de l’empereur Marc Aurèle, qui exerça la fonction, entre 163 et 168. Justin comparut en présence de six autres chrétiens, une femme nommée Charitô et son père Chariton, ainsi que quatre hommes dont l’esclave impérial Evelpistos, originaire de Cappadoce, le Phrygien Hiérax, Pæon et Liberianus, lors d’un procès qui nous est connu par les Actes de Justin.
L’interrogatoire mené par Rusticus montra que celui-ci considère Justin comme un pair et l’interroge lui-même comme un philosophe. L’interrogatoire des accusés, qui plaça le débat sur un plan philosophique plutôt que religieux, laissa transparaître la crainte d’un prosélytisme que récusèrent les compagnons de Justin. Ce fut sa profession de foi devant le magistrat qui, teintée d’eschatologie, entraîna la condamnation à mort de Justin.
Suivant la tradition, Justin subit le m artyre avec six de ses compagnons à une date imprécise de la seconde moitié du IIe siècle, le Chronicon d’Eusèbe évoquant l’année 154 et le Chronicon Pascale, l’année 165, peu après que Justin adressa à Marc Aurèle une Apologie dont le contenu contribua à sa condamnation. Ses disciples Tatien le Syrien, originaire de l’Adiabène, puis Rhodon, originaire d’Asie Mineure, poursuivirent son enseignement à Rome et on doit au premier un Diatessaron, une harmonisation des quatre évangiles qui fut en usage dans les Églises de langue syriaque jusqu’au Ve siècle.
Le Martyrologe hiéronymien fixe la célébration du martyre de Justin à la date du 14 avril. Depuis la réforme liturgique de 1969-1971, l’Église catholique romaine célèbre Justin comme saint le premier juin, tout comme l’Église orthodoxe.
Diacre Michel Houyoux
Vidéo Saint Julien : cliquez ici → https://youtu.be/rUaAp4Cbrt4
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