Vingt-septième dimanche du Temps Ordinaire Année Paire
Posté par diaconos le 1 octobre 2024
Le divorce est la rupture officielle d’un mariage civil ou religieux liant précédemment deux personnes ou plusieurs en cas de polygamie. En droit il se distingue de la séparation de fait, sans conséquence juridique, et de la séparation de corps qui est reconnue juridiquement mais qui laisse subsister le mariage. À ne pas le confondre avec l’annulation de mariage qui consiste à déclarer que celui-ci n’a jamais eu lieu. En Grèce antique, le divorce exista sous des formes diverses suivant les cités. À Athènes, il put être obtenu par consentement mutuel ou sur l’initiative de l’un des conjoints. En pratique, la dot constitua un frein puissant : lorsque le mariage est dissous, la femme récupère sa dot — sauf en cas d’adultère — avec un intérêt de 18 %.
De son côté, celle-ci a le droit de demander le divorce elle-même, mais le plus souvent la requête se faisait par l’intermédiaire de son tuteur légal (père, frère ou tout autre parent masculin) : la demande, dûment motivée, fut déposée auprès de l’archonte qui l’examina et choisit de lui donner suite ou non. Les mauvais traitements constituent un motif valable de séparation, mais non l’infidélité du mari.
À l’époque hellénistique, le divorce fut davantage formalisé : des documents légaux prirent acte du divorce et en déterminèrent les conséquences. La disposition la plus importante concerna la dot, restituée à l’ex-épouse. Celle-ci n’eut jamais droit à une quelconque part des biens du ménage. Chez les Romains, le divorce fut pratiqué. Au début, le droit de divorcer était réservé aux hommes, mais très rapidement les femmes obtinrent ce droit. Le mariage qui était dans un premier temps un rituel religieux et social se désacralisa comme le reste de la société romaine. Il était codifié dans le droit.
À la fin de l’Empire, le divorce devint à peine formel, car pour des raisons de simplification, le mariage fut assimilé à un contrat. Les célibataires restant cependant défavorisés par la loi. Au début du Moyen Âge, le mariage ne fut pas consacré et les contrats écrits tombèrent en désuétude. Le mariage ne permit que de sceller des alliances. Il fut considéré comme normal de pouvoir rompre le mariage. L’Église catholique romaine n’est guère favorable au divorce et considère le mariage comme indissoluble. Cependant, les règles en la matière apparaissent surtout dans des décisions des conciles particuliers, qui n’abordèrent souvent que des cas particuliers et apportent des réponses contradictoires.
De l’Évangile de Jésus Christ selon Marc
En ce temps-là, des pharisiens abordèrent Jésus et, pour le mettre à l’épreuve, ils lui demandaient :« Est-il permis à un mari de renvoyer sa femme ? » Jésus leur répondit : « Que vous a prescrit Moïse ? » Ils lui dirent : « Moïse a permis de renvoyer sa femme à condition d’établir un acte de répudiation. » Jésus répliqua : « C’est en raison de la dureté de vos cœurs qu’il a formulé pour vous cette règle.
De retour à la maison, les disciples l’interrogeaient de nouveau sur cette question. Il leur déclara :
« Celui qui renvoie sa femme et en épouse une autre devient adultère envers elle. Si une femme qui a renvoyé son mari en épouse un autre, elle devient adultère. »
Des gens présentaient à Jésus des enfants pour qu’il pose la main sur eux ; mais les disciples les écartèrent vivement. Voyant cela, Jésus se fâcha et leur dit : « Laissez les enfants venir à moi,
ne les empêchez pas, car le royaume de Dieu est à ceux qui leur ressemblent. Amen, je vous le dis :
celui qui n’accueille pas le royaume de Dieu à la manière d’un enfant n’y entrera pas. »Il les embrassait et les bénissait en leur imposant les mains. (Mc 10, 2-16)
Est-il permis de répudier sa femme pour quelque motif que ce soit ?
Jésus avait déjà résolu cette question dans le sermon sur la montagne. Les pharisiens la lui posèrent pour le tenter. Ce qui en fit une question captieuse, ce fut qu’elle était alors vivement débattue entre deux écoles juives, celle de Hillel et celle de Schamaï, le premier très relâché, le second plus sévère sur le divorce. En outre, l’exemple donné par Hérode Antipas, qui régnait sur la Pérée, et la fin de Jean-Baptiste qui l’avait repris, rendaient assez dangereuse une solution rigoureuse de la question, tandis qu’une solution plus libre aurait mis Jésus en contradiction avec Jean-Baptiste.
Pour quelque tout sujet de plainte que le mari aurait contre sa femme : ce fut dans ce sujet que se trouva la tentation, le piège tendu à Jésus par ses adversaires. L’idée complète et vraie du mariage suppose avant tout que les deux sont un cœur et une âme ; tout ce qui tient à la chair, au sens restreint, n’est que le lien inférieur de cette union.
Le mot chair, dans l’Écriture, embrasse tout l’homme, son être entier, cette idée est bien exprimée par cette parole : une seule chair. Telle est l’intimité absolue et indissoluble du mariage, que Dieu a eue en vue dès l’origine de la création de l’homme, et que Jésus confirma de son autorité.
En outre, cette déclaration est une condamnation de la polygamie, qui détruit de fond en comble la vraie notion du mariage. Les pharisiens pensèrent avoir pour eux l’autorité de Moïse. Mais ils exagérèrent la portée de la disposition légale qu’ils invoquèrent, car Moïse ne commanda pas ni ne voulu faciliter le divorce ; le but de la formalité qu’il prescrivit fut au contraire d’y mettre une entrave. Jésus rectifia l’expression des pharisiens en disant permis.
Telle n’était pas l’intention de Dieu. Si Moïse l’eut permis, c’était comme un mal nécessaire, destiné à éviter de plus grands maux, et uniquement à cause de cette dureté de cœur qui vous rendait incapables de vous élever jusqu’à la pensée divine et de la mettre en pratique. Si l’on demande comment Dieu immuable put sanctionner cette déviation de sa propre loi, la réponse se trouve dans le fait de la chute et du péché intervenu depuis la création de l’homme. Telle fut la pensée que Jésus exprima par ce mot énergique : la dureté de votre cœur.
Jésus n’admit qu’une seule cause légitime de divorce, et il interdit d’épouser une femme répudiée. En parlant ainsi, il se plaça au point de vue de son royaume, et ses disciples ne durent pas se conformer à ce principe, le seul sur lequel repose le mariage chrétien. Aucune Église soumise à l’autorité de Jésus ne saurait en sanctionner un autre. En résulte-t-il que la société civile, en des pays qui portent le nom de chrétiens, ait tort de statuer par sa législation d’autres causes de divorce et d’autoriser des époux séparés à contracter un second mariage ? Faut-il astreindre tous les citoyens d’un pays à la pratique d’un principe chrétien ?
À cette question, comme à une foule d’autres analogues, le catholicisme a répondu oui, parce qu’il est la religion de la contrainte, et ne prétend à rien moins qu’à dominer la société ; le protestantisme répond non, parce qu’il veut avant tout la sincérité et la liberté morale. Que la société civile ait donc égard, si elle le veut, à la dureté du cœur, qu’elle autorise un mal pour éviter des maux plus grands ; mais que les Églises voient si elles peuvent, sans infidélité, se prêter, en ce qui les concerne, à sanctionner des unions nuptiales contraires à la parole de Jésus.
« Si telle est la condition de l’homme à l’égard de la femme, il n’est pas avantageux de se marier. » (Mt 19, 10) Les disciples firent à Jésus cette observation, après que les pharisiens se fussent éloignés. Eux-mêmes trouvèrent trop dure la condition que Jésus imposa à l’homme à l’égard de la femme. Ils estimèrent que si l’homme ne put rompre une union mal assortie, s’il dut supporter tous les défauts et tous les vices de sa femme, sauf celui indiqué par Jésus, il valut mieux ne pas se marier.
Il n’est question que de la condition du mari à l’égard de la femme, parce qu’en Orient et dans l’antiquité des droits égaux n’étaient pas reconnus à cette dernière. Il en est tout autrement sous l’Évangile.
Pour faire mieux comprendre sa pensée et la nature toute morale du don qu’il eut en vue, Jésus distingua trois cas : ceux qui, dès le sein de leur mère, par suite de leur organisation particulière, sont impropres au mariage, ceux qui ont été rendus tels par les hommes ; dans ces deux premiers cas le don de continence est entendu en un sens corporel et n’a aucune valeur religieuse, ceux enfin qui ont pris cette résolution volontairement à cause du royaume des cieux, non pour le mériter, mais pour s’y employer tout entiers et sans empêchements terrestres.
Ainsi Jésus, en répondant aux disciples, constata un fait, mais n’exigea pas ce sacrifice, pas plus que Paul dans ses conseils. Il n’y a dans ces paroles, rien qui soit défavorable au mariage chrétien, ni qui attribue au célibat une sainteté particulière, bien moins encore un argument en faveur du célibat forcé de toute une classe d’hommes.
Diacre Michel Houyoux
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